Les autorités parviendront-elles à financer la gratuité scolaire garantie par la Constitution et promise par l’actuel président de la République Félix Tshisekedi lors de sa campagne électorale ? À quelques jours seulement de la rentrée scolaire, le gouvernement tente de rassurer.
C’est un défi immense et complexe que s’apprête à relever l’État congolais : rendre l’école gratuite. Pour le moment, seules 30 773 écoles, sur les 51 574 que comptent le secteur public, vont bénéficier d’une prise en charge. Au total, 28 millions de dollars seront consacrés chaque mois à la gratuité de l’éducation de base (qui commence à la maternelle et comprend une partie du secondaire).
La gratuité de l’enseignement de base est garantie par la Constitution mais elle n’a jusque-là jamais été appliquée. Félix Tshisekedi a fait de sa mise en oeuvre une promesse de campagne.
Le Secrétaire général à l’Enseignement primaire, secondaire et professionnel (EPSP), Jean-Marie Mangobe Bomungo, a précisé, dans un courrier officiel du 27 août 2019, que cette mesure ne s’appliquera qu’aux écoles publiques budgétisées.
Les 20 801 écoles non-budgétisées devront quant à elles encore attendre pour bénéficier de la gratuité de l’éducation de base.
Des mesures pour faciliter la gratuité
Pour s’assurer de l’application de la gratuité, les autorités de tutelle, ont donné quelques précisions quant aux mesures d’accompagnement devant faciliter la gratuité de l’enseignement de base dans des écoles publiques.
Il s’agit notamment de « la suppression sous toutes leurs formes, de tous les frais de scolarité dans les établissements publics d’enseignements budgétisés de l’éducation de base ; la suppression de frais de motivation payés par les parents d’élèves aux enseignants dans tous les établissements publics d’enseignements budgétisés ; l’interdiction de transformer les écoles en maison d’approvisionnement et de vente des fournitures et articles scolaires (uniformes, écussons, journaux de classe, cahiers, cravates, et autres fournitures, etc.»
Aussi, le ministère a insisté sur « l’obligation de laisser aux parents la latitude de se procurer les articles, et fournitures scolaires notamment les uniformes scolaires sur les marchés et au prix du marché ; et l’interdiction des signes recognitifs à apposer aux uniformes en guise d’exécution ou de badges identifiant les écoles ».
« Je suis venue ici pour retirer les frais que j’avais déjà payés parce que là le gouvernement a confirmé que l’éducation de base est gratuite », dit Julie Kama Nkashama rencontrée devant une école publique avec son enfant. Elle ressort de l’établissement quelques minutes plus tard, souriante, avec 225 dollars en mains.
D’autres parents qui avaient inscrits leurs enfants dans des écoles privées, veulent désormais profiter de cette gratuité et cherchent des places dans les écoles publiques concernées.
Salaire des enseignants
Par ailleurs, le gouvernement a fait savoir qu’il régulariserait, dès le mois d’octobre, le salaire de 15 000 enseignants sur 132 614 qui n’ont pas été payés depuis plusieurs mois.
Le gouvernement prendra d’autres frais à sa charge : il paiera notamment des indemnités de logement et de transport aux enseignants de la ville de Kinshasa et des chefs-lieux des provinces, dès la paie du mois d’Août 2019
Esther Ndaya, mère de deux enfants, dit espérer que le gouvernement s’acquittera de ses engagements, notamment en ce qui concerne le salaire des enseignants, pour éviter toute grève et maintenir l’enseignement de qualité.
2,9 milliards de dollars pour la gratuité de toutes les écoles publiques
Les moyens nécessaires à la mise en œuvre totale de la gratuité de l’enseignement de base sont très lourds. Pour parvenir à la gratuite pour toutes les écoles publiques, l’État congolais devrait dépenser, chaque année, 2,9 milliards de dollars, soit 50% des recettes publiques du pouvoir central.
« Attendons de voir la rentrée scolaire lundi prochain pour évaluer le succès de la mesure sur la gratuité de l’enseignement de base décrétée par Félix Tshisekedi. Mais d’ores et déjà on peut noter la forte volonté politique assumée et affichée par le chef de l’État et qui s’est traduite par la suppression de plusieurs frais scolaires », anaylse le journaliste Israel Mutala. Et de poursuivre : « La dynamique enclenchée pour rendre l’enseignement de base gratuit est irréversible ».
Il appartient désormais à l’État et aux provinces de trouver des mécanismes de financement idoines. L’impôt foncier bien collecté par les provinces pourrait être l’une des sources sûres pour le financement de la gratuité de l’enseignement de base, estiment certains observateurs.